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Récemment, la personne qui traduit mon livre en russe (oui je sais, cela semble fou et super excitant) m’a posé une question pour faciliter son travail. Elle m’a envoyé une phrase du livre et m’a demandé de lui expliquer, car « elle ne parvenait pas à comprendre où était le sujet dans la phrase. » Je partage ma réponse ici, en espérant qu’elle ne soit pas seulement utile pour mon traducteur.

La phrase : « L’être n’est que cela, ce qui se fait dans le processus d’être »

On a tendance à penser qu’il y a un sujet (un « je », un « il » etc) avant une action, que c’est ce sujet qui exécute l’action. Grammaticalement, le sujet précède généralement le verbe, ce qui renforce l’idée que le sujet est antérieur, qu’il précède l’action qu’il effectue, comme si l’action / le verbe était un agrégat qui s’ajoute au sujet qui existait déjà.

Pour la pensée existentielle, l’antériorité du sujet sur l’action est une croyance culturellement étendue, mais fausse. Existentiellement parlant, il n’y a pas de sujet avant le verbe, pas de « quelque chose » ou de « quelqu’un » avant l’action.

Du point de vue existentialiste, c’est l’action elle-même qui construit le sujet. On peut dire que l’action et le « quelque chose / quelqu’un » qui l’exécute semblent exister simultanément exactement au même moment.

Il n’y a pas de marcheur tant qu’il n’y a pas l’action de marcher, il n’y a pas de coureur tant que l’on observe pas l’action de courir, il n’y a pas d’existant tant qu’il n’y a pas l’action d’exister, que nous nommons existence (désolé pour la confusion possible de cette phrase).

Le sujet n’est toujours qu’en train d’exister (qu’en action), c’est-à-dire qu’il n’y a de sujet que dans la mesure où il accomplit une action. Il n’y a de sujet que dans la mesure où il y a un verbe. C’est donc, dans cette perspective, le verbe qui crée/fait le sujet et non le sujet qui crée ou fait le verbe.

Nietzsche l’exprime également lorsqu’il écrit que : « le peuple sépare la foudre de son éclat pour considérer l’éclair comme une action, effet d’un sujet qui s’appelle la foudre ». Par cette phrase il souligne comment, linguistiquement, nous avons donné au sujet une place qu’en réalité il n’a que par son action. Lorsque nous disons « foudre », nous faisons déjà référence à l’action.

La même chose se produit dans le cas de l’être. « L’être n’est que cela, ce qui se fait dans le processus d’être » se réfère au fait que « l’être » est l’expression d’une action, ce que nous avons tendance à confondre avec un sujet qui accomplirait des actions. Mais en réalité, « être » est déjà une action. C’est l’action d’exister. L’être n’existe pas comme sujet sans action / verbe. Il n’y a rien de plus que ce qui est en train d’être, surtout si par « être » nous entendons l’être humain.

Source : Yaqui A. Martínez Robles

Traduit de l’Espagnol par Approche PEARL